18 09 11

The poetry consultations

Les poetry consultations sont des propositions payantes de correction, d’aide à la correction, d’aide à l’émancipation poétique, de rectification faites par des poètes plus ou moins confirmés, mettant souvent en avant une forme d’expertise et de légitimité par la publication papier, mais offrant leur aide essentiellement sur Internet. Les poèmes sont discutés, annotés, commentés – en marge, comme un devoir. “The aliteration here works well”, “I love this line, so wet and true”. La critique y est désespérément calquée sur l’analyse universitaire la plus normative, la moins imaginative :

Spectacular stanza. It is everything to me that poetry is – delicious in content and in the execution of expressing/illustrating the content.1

Les figures connues du “poétique” y sont valorisées, on y blâme tout ce qui ne fait pas suffisamment signe au littéraire 2. Ce n’est donc pas une chose très drôle.

Les poetry consultations jouent, à un degré anecdotique mais dans toute la dimension de la mesquinerie de leur projet, le rôle de petites instances de la subjectivité. Elles ont l’ambition typique des magazines qui aident à mieux (habiter corps, esprits, maisons, jardins, se trouver & être soi-même), c’est-à-dire l’ambition d’un bon gros maintien de l’ordre rhétorique, qui consigne le sujet lors de comparutions réglées.

Les témoins les plus zélés de cette juridiction ne sont pourtant pas ces greffiers isolés aux manières de bourres en retraite, mais ceux auxquels on veut bien prêter le nom d’écrivain ou de poète pourvu que leurs dioramas ne quittent pas le musée des étagères particulières. Leur rire, devant l’effrayante familiarité de ce qui les dévisage, masque mal un rictus de civilisé ; ils savent qu’aucun de leurs livres au fond n’enfreint ce règlement et que leur langue épouse le « monde disert », dont parle Bataille, « où la logique réduit chaque chose à l’ordonnance ».

Le style, qu’ils révèrent sous différents noms, est toujours plus ou moins de l’ordre du perfectionnement social et ne se donne aucune chance, en tant que tel, de révéler en se distinguant les degrés rhétoriques des discours ambiants. Ils n’aggravent rien, ils accompagnent simplement les évolutions d’une langue de cour et font, dans l’excitation badine d’une chasse réglée du sens, du cut-up sans le savoir.

Leurs références sont parfois excellentes mais, considérées comme les témoignages d’un usage particulier de la langue, il ne leur est offert que de troubler l’usage. Usage qui reproduit l’ordinaire déduit du sens & du son, dans une réponse parfaitement adressée à une supposée commande sociale d’époque.

Cette manière qui s’ignore a pris conseil dans ses lectures dont elle a fait des modèles techniques. Elle a infiniment consulté et finalement produit des TPE 3, ateliers, workshops ou masters de creative writing 4, qui signalent la règle comprise & l’exercice assimilé. Ainsi, pourvu qu’il cultive sa peur d’être indigne de la langue des autres, notre élève sera admissible aux normes d’une communication partageable comme un dessert.

 

 

  1. « Strophe spectaculaire. C’est tout ce qu’est pour moi la poésie – délicieuse dans le contenu et dans la façon d’exprimer/illustrer le contenu. »
  2. Quelques propositions de poetry consultation : 1, 2, 3, 4, 5Ici, un cas particulier de poésie à usage thérapeutique.
  3. TPE : 1) travaux personnels encadrés ; 2) Très petites entreprises
  4. Ainsi introduits : Création littéraire, juste une mise au point.