C’est pendant le béchage que le jeune reçoit sa première éducation, car dès ce moment la mère et ses oisillons conversent et l’on dit alors des jeunes qu’ils chantent en coquilles. Le jeune sort tout mouillé de sa coquille et pendant vingt-quatre heures reste sous la mère pour se sécher. C’est la période du séchage. Le jeune non encore adulte s’appelle aussi pouillard.
La perdrix piète quand elle fuit à pied sans voler, mais si elle vole au ras du sol, on dit qu’elle rase.
Lorsqu’une poule perdrix qui a pondu voit ses œufs détruits ou disparus par un fait quelconque, elle recommence une autre ponte et cela s’appelle un recoquetage. Quand les perdreaux suivent leurs parents sans pouvoir encore voler, ils sont à la traîne. Si la perdrix se cache derrière une motte de terre, cette action s’appelle s’amotter.
La femelle appelle le mâle par son chant spécial et on lui donne à ce moment le nom de chanterelle, en disant d’elle qu’elle rappelle. D’une perdrix accouplée, on dit qu’elle est adouée.
(Cynégétique de la perdrix par un expert en agriculture (chasse, gibier) près les tribunaux.)
Savoir par qui on est chassé, et comment, passe peut-être par débusquer dans la langue des assignations politiques ces indicatifs cynégétiques qui naturalisent les formes de vie, en déterminent les rythmes, en scandent l’existence par la discrétisation des actions et des attitudes, n’en considèrent que ce qui a trait à la croissance ou la reproduction : on dit de lui qu’il chante en coquille, on dit d’elle qu’elle est à la traîne ; c’est la période du séchage ; on dira d’eux qu’ils ont adoués ; on fera remarquer que celui-ci rase tandis que celle-là recoquette.
L’opération par laquelle un lexique emprunté aux patois se conserve intact et s’entretient comme langue de cour (à la fois d’expertise et de connivence) est à mettre en regard de celle par laquelle la langue tribunale, inepte à dialectiser, trouve à s’affermir miraculeusement dans l’égrènement des faits et le sentencieux des sentences.
Le monopole du feu seul offre aux chasseurs une vue flatteuse sur un monde rangé comme un diorama, tenu en respect dans ce genre de légalité organique qui fait les histoires naturelles, avec leurs misérables taxons : « agriculture (chasse, gibier) ».
Quand les petits s’écoquillent seuls, on dit qu’ils cassent. Quand ils cessent de se cacher pour surgir en nombre des mottes, ce mouvement s’appelle l’émotte.
vignette parue dans la revue Hex et diffusée sous forme de tract